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Peste cléricale (La)

La Peste cléricale. Organe de lutte contre toutes les calottes

La Peste cléricale, organe de lutte contre toutes les calottes est l'une de ces éphémères petites feuilles anticléricales et antireligieuses lancées dans les mouvances socialistes et/ou anarchistes, à l'imitation de La Calotte. Comme les autres, La Peste cléricale (imprimeur gérant J. B. Knockaert, rue de la Prairie à Tourcoing), s'écroula après quelques numéros, (trois semble-t-il dans ce cas, tirés mensuellement à mille exemplaires selon la déclaration de dépôt), sans qu'on sache si cette disparition était due au manque de lecteurs malgré le prix modique de cinq centimes au numéro, à l'épuisement du capital de départ, à des pressions sur l'imprimeur, à la menace de procédures à venir ou à des procès bien réels.
Ces journaux veulent rendre coup pour coup à l'Église, qui ne ménage pas socialistes, syndicalistes et anarchistes, les traîne dans la boue aussi bien en chaire que dans sa presse. Ils opposent la misère des ouvriers qui triment et tirent le diable par la queue, et les prêtres et moines qui vivent dans l'opulence sans rien faire.
La Peste cléricale se réjouit que l'homme soit presque partout débarrassé du joug religieux, mais regrette que le beau sexe reste le dernier pilier de la religion. S'il n'affirme pas très fort ses convictions, l'ouvrier risque de faire du logis familial un lupanar religieux où les colombes font des enfants aux femmes. Les débordements sexuels des prêtres sont une figure obligée de ces périodiques, qui ne manquent pas de mettre en relief toutes les affaires de mœurs qui les concernent.
Selon notre journal, la confession est pour les enfants l'école de l'impudicité ; en témoigneraient les guides d'examen de conscience, et les manuels du confesseur, par les questions qu'ils conduisent à poser à des enfants supposés innocents (n°2).
La Peste cléricale pose aussi des questions qu'elle veut drôles. Si le pain se transforme en sang du Christ, et le pain en sa chair, les catholiques qui communient le vendredi ne respectent donc pas le jeûne et l'abstinence prônée ce jour là? Si Dieu a fait l'homme à son image, est-il blanc ou noir? Et s'il est tout puissant, où était-il pendant les inventaires? Elle offre même une prime de dix mille francs à qui pourra répondre à la question : comment les fils d'Adam sont-ils devenus pères, puisqu'il n'y avait pas de femmes, à l'exception de leur mère?
Bien entendu, La Peste cléricale stigmatise l'inquisition (qui aurait brûlé 228660 hérétiques, pas un de moins ou de plus). Elle dénonce aussi le cléricalisme dans les usines, instauré par les patrons à leur avantage, et dans lequel on peut voir un véritable viol des consciences. On impose parfois le catéchisme aux enfants jusqu'à seize ans; le patronage est parfois obligatoire pour les jeunes ouvriers; dans certaines usines, une prière est dite avant de commencer à travailler; des religieuses sont employées comme contre-dames; des conférences (obligatoires) sont prononcées par des curés sur le lieu de travail... Toutes choses qui, si elles ne se produisent pas continuellement dans toutes les usines de Roubaix, sont tout de même ponctuellement attestées.